Le basculement de la dernière phalange
La fourbure est une inflammation des lamelles charnues du chorion du pied, appelé également chorion laminaire.
Comment nait cette inflammation ?
Elle peut avoir des causes multiples : le stress, les diarrhées, la septicémie, les affections hépatiques ou rénales dues à l’alimentation,
l’excès de poids, la non délivrance, les troubles hypophysaires, la fatigue, la surcharge due à un membre immobilisé, le dopage aux stéroïdes,
le talon trop haut, la ferrure orthopédique qui soulève le talon.
Le flux sanguin est interrompu et la microcirculation lamellaire est bloquée. S’en suit une nécrose des lamelles qui entraine la coupure de
la liaison entre la paroi, le chorion lamellaire et l’os de la dernière phalange.
A partir de là, deux thèses s’opposent pour expliquer la désolidarisation de la boite cornée de l’os :
- Les lamelles ne peuvent plus soutenir le poids du corps, ni résister à la traction du tendon fléchisseur profond du doigt. Celui-ci exerce un effet de levier sur l’os et le fait basculer vers l’arrière. La rotation le détache de l’étui corné, et peut provoquer la perforation de la sole dans les cas graves.
- La phalange ne bascule pas, elle est au bon endroit, au bout du squelette, et son articulation est mobile. C’est le sabot qui a bougé par rapport à la phalange.
Les conséquences
Le décollement entre la paroi et l’os est très douloureux. Pour diminuer cette douleur le cheval évite de marcher et s’appuie très fortement sur ses talons antérieurs où persistent les seules bonnes attaches. Il est alors campé du devant. Pour soulager le poids que l’avant main, il engage ses postérieurs sous la masse et est ainsi sous lui du derrière.
L’appui sur les talons antérieurs déclenche plusieurs réactions :
- Le tendon est tendu au maximum, cette tension augmente le basculement de la troisième phalange pour la thèse n°1
- La paroi en pince est très détachée et pousse en babouche : à chaque pas un effet de levier augmente le détachement de la paroi, la longueur excessive amène le cheval à trébucher.
Traiter
Tout le monde est d’accord sur le fait qu’il faut traiter les causes avant que de s’attaquer aux symptômes, sinon le cheval ne guérira pas.
L’inflammation est due à des désordres organiques : l’alimentation doit être entièrement réétudiée, le cheval est souvent mis à la diète.
Ensuite, le cheval est soulagé de sa douleur :
- Par des anti-inflammatoires, en faisant attention qu’ils ne créent pas d’autres troubles physiologiques
- Par un parage adéquat : à nouveau les deux thèses s’opposent quant aux solutions.
Le parage en question
La méthode classique – thèse 1 :
En tirant sur le dernier os du pied et en conservant le doigt du cheval fléchi, le tendon n’est plus sollicité et s’est raccourci.
De ce fait, les structures internes vont spontanément conserver leur mauvaise configuration malgré la fabrication d’un nouveau sabot
dont la paroi se trouvera en situation d’être détachée.
Le tendon s’est raccourci et maintient la phalange dans une mauvaise position.
La flèche verte indique le point d’appui du pied (douloureux), que le cheval essaie de rectifier en se campant.
Pour réduire la traction du tendon, les MF posent un padd ou une talonnette sous la fourchette, afin de soutenir la troisième phalange. Ils préconisent des fers en cœurs ou à l’envers et l’immobilité du cheval.
En conservant le talon haut avec des talonnettes ou des fers spéciaux, la phalange ne retrouve pas son orientation naturelle,
elle risque de traverser la sole.
La séparation de la paroi permet souvent aux bactéries de s’installer et il n’est pas rare d’avoir, en plus, à soigner une fourmilière.
La méthode – thèse 2 :
La douleur du cheval est située en pince. En raccourcissant le sabot en pince, le pareur élimine le bras de levier qui tire la paroi
vers l’avant et permet une diminution de la douleur.
Le cheval va pouvoir progressivement recommencer à marcher, donc à se rééduquer.
Les talons, s’ils sont trop hauts, sont raccourcis progressivement pendant plusieurs semaines pour permettre une réadaptation progressive
de l’élasticité du tendon raccourci.
Le talon trop haut est raccourci progressivement, afin de permettre au tendon de retrouver sa fonction progressivement.
Les pinces des postérieurs amenés trop en avant sont généralement trop longues, le cheval ne pourra retrouver des aplombs postérieurs,
garants des aplombs antérieurs, que si elles sont réduites. Il faut donc aussi parer les postérieurs.
Résultats
La connexion entre l’os et la paroi ne peut être retrouvée en forçant la troisième phalange à se relever par le biais
de talonnettes, de padd, ou de fer en cœur. Cette méthode ne tient compte que du tendon et pas de la position de l’os par
rapport au sol. Elle soulage la douleur dans un premier temps mais ne donne pas de résultats sur le long terme.
L’os doit se poser le plus près possible de sa position naturelle pour obliger le tendon à retrouver progressivement son élasticité
et sa fonction. Il ne doit pas être soulagé mais sollicité. Seul le mouvement du cheval le permet,
l’immobilisation et le soulèvement des talons retardent donc la guérison.
Dessin 1 : le talon est trop haut, la dernière phalange n’st pas correctement orientée. La longueur de la pince exerce un effet de levier
qui sépare la paroi de l’os. Pour s’en rendre compte, il suffit de comparer l’angle de pousse de la corne au niveau de la couronne
(1er cm en haut) avec l’angle de la corne en bas du sabot.
Dessin 2 : en raccourcissant seulement le talon, l’os retrouve son orientation, mais l’effet de levier en pince existe toujours
et forme à moyen terme les sabots en babouche.
Dessin 3 : le talon et la pince raccourcis, le cheval va pouvoir réutiliser progressivement son pied. Cette stimulation va aider
une nouvelle corne à pousser, elle pourra le faire en suspendant correctement l’os.
Pour retrouver une adhérence entre la paroi et l’os, il faut attendre la pousse d’une nouvelle corne avec son nouveau chorion lamellaire
pour la suspendre, c'est-à-dire environ 6 mois !
Pendant cette nouvelle pousse, il faut absolument que toutes les causes de la séparation et/ou de la rotation
de la troisième phalange soient enrayées. Il est à remarquer que le premier centimètre de corne, à partir de la couronne,
est très souvent orienté dans le même sens que l’os : naturellement, le pied essaie de faire de la bonne corne si rien ne l’en
empêche, il y parvient.
Bibliographie :