L'attelage Pédagogique

pédagogie

L'agressivité

Notre culture équestre valorise un enseignement dur, dynamique, axé sur l'effort voire l'épuisement, et dicté d'une voix forte parfois même criarde.

Les cavaliers adultes perçoivent énormement d'agressivité de la part des enseignants d'équitation, en premier lieu, de ceux qui crient. L'agressivité est perçue de façon subjective, elle existe à partir du moment où une personne la ressent, en fonction de son éducation, de ses valeurs, de son expérience ou de sa confiance en soi. C'est la perception qui compte, la perception de celui qui reçoit, et non l'intention de celui qui émet l'acte.

L'agressivité est ressentie par rapport à :
- une atteinte à l'intégrité morale : le système de valeur "bien-mal" de la personne est remis en question
- une atteinte à l'intégrité physique : la proximité est trop importante, la simple présence fait peur
- une atteinte à l'intégrité affective : la dévalorisation et l'humiliation casse le moral des cavaliers qualifiés aussi d'"antidoués"
Les cavaliers redoutent :
- d'être mauvais
- les enseignants agressifs.

Ils sont d'autant plus réceptifs à la période de l'adolescence ou lors de certaines situations particulières : personnes dépressives, période de fragilité, maladie ...
Ils détestent :
- les moniteurs irrascibles, de mauvais poils, qui crient en dénonçant les défauts au lieu de corriger ou d'expliquer, qui crient tout court
- les moniteurs qui ne parlent pas de la reprise, qui ne font aucun commentaire,
- les moniteurs qui font descendre les élèves pour leur prouver, en montant, qu'ils sont nuls.
- les moniteurs qui se désintéressent des cavaliers qui ne font pas de compétition ou qui ne montent pas au moins deux fois par semaine.
- les moniteurs qui ont des a-priori sur les propriétaires de chevaux.
- les moniteurs qui utilisent des petites phrases blessantes
- les moniteurs qui ont un chouchou
- les moniteurs qui attribuent toujours les chevaux difficiles ou blasés au même cavalier
- les moniteurs qui proposent toujours les mêmes exercices, des cours inintéressants, qui ne savent plus ce que la reprise a fait la semaine précédente, laissent le choix aux élèves, téléphonent ou discutent pendant les cours, ne s'interessent à aucune progression, , ne regardent pas les élèves mais donnent quand même des appréciations.
- les moniteurs qui rembarrent dès qu'un élève pose une question, émet un avis sur son cheval, ou explique qu'il ne se sent pas prêt.

L'histoire n'est pas figée et la culture évolue. Les enseignants sont dorénavant plus posés, reposants, animant des reprises tout en douceur et en cherchant à s'adapter à leur public. Calme et patience sont des qualités recherchées à notre époque. Rappelons que l'équitation est aujourd'hui associée au calme, à la nature, au bien être, à la détente.
On comprend également tout l'interêt pour l'enseignant, de ne pas enchainer 6 heures de cours d'affilé, mais de mieux connaitre ses élèves pour comprendre leur état du moment, adapter les consignes, et faire attention aux expressions habituelles, le cas échéant (enfant qui a perdu un parent, handicap non visible ...)

Les personnes sont agressives lorsqu'elles se sentent en danger ou quand elles souffrent. Dans le premier cas, c'est un système de défense qui se met en place, dans le second, c'est le système de protection.

L'enseignant est agressif. Quand ?
- il est saturé par un grand nombre de problèmes qui ne sont pas forcément tous pédagogiques : nombre d'élèves, niveau hétérogène, cavalerie pas adaptée, conditions extérieures, condition de travail, agression par autrui (parents, direction, entre lesquels il sert souvent de tampon ...)
- il est incompétent : ne sait pas gérer un public handicapé, ne sait pas atteler, ne connait rien à la voltige, mais on lui demande quand même d'animer ces séances spécifiques.
- les élèves le déçoivent : ils n'atteignent pas les objectifs, ils n'écoutent pas, ils ne veulent rien faire
- il est fatigué, malade (oui, les enseignants travaillent quand ils sont malades), donc vulnérable et irritable
- il s'ennuie : la routine dégoûte et le manque de préparation contrarie.

Dans un premier temps, il faut éviter les situations qui génèrent l'agressivité. Comment ?
- Etre à l'aise tout le temps : maitriser les contenus, se perfectionner en pédagogie comme en technique
- Avoir confiance en soi : permettre l'échec ou l'erreur, savoir l'analyser, prendre du recul, écouter, refuser d'entrer dans les conflits.
- Etre au meilleur de sa forme : une bonne hygiène de vie confère un équilibre physique, intellectuel et émotionnel;
- Etre ouvert d'esprit : discuter au lieu de critiquer ou d'insulter, accepter les autres et soi-même, comprendre et faire confiance sans manipulation ou fuite.

Toute l'énergie mise dans l'agressivité peut être recyclée au service d'une meilleure relation-communication avec les élèves qui sont également des clients. Les agressifs montrent leur faiblesse, tandis que les calmes sont juste forts.